Etat de droit
L'étude de novembre 2008 / mars 2009
Les « arguments » les plus utilisés pour défendre l'idéologie anti-sanction à l'école
Dont une direction sans faille ET une hiérarchie qui vous soutienne activement tout le temps.
Et le tour est joué ! Déclinaison au pluriel de « l'argument » précédent.
Oui mais voilà : ce n'est pas toujours le cas... Il est même probablement assez rare que TOUTES ces excellentes conditions
soient réunies. Encore plus rare qu'elles le soient en permanence. Et parfois, quand bien
même chacun des membres d'une équipe pédagogique serait de très bonne volonté et d'une très haute compétence, il est
de ces situations scolaires voire extra-scolaires où la solidarité collective des professeurs ne pourra pas faire des
miracles. Bien sûr, l'affichage est toujours guilleret : on ne baissera jamais les bras ! On s'en sort. On en veut.
On est soudé. On fait face. Dans ma classe, c'est moi le chef ! (...) Tout cela est bien beau. C'est même
plutôt réconfortant et honorable, jusqu'à un certain point... (Le risque d'un abus de pouvoir n'étant pas nul dans la
dernière exclamation.) Mais quand on creuse un peu, on s'aperçoit assez souvent que la réalité est moins glorieuse, à
commencer par des résultats scolaires rarement au rendez-vous dès que le niveau d'indiscipline et de violence à l'école
devient élevé. C'est par exemple, un jour, cette professeur qui commence à vous dire qu'elle n'a pas de problème
particulier dans sa classe (...) MÊME SI c'est vrai (lâche-t-elle 10 minutes plus tard) que le niveau de ses élèves
n'est pas fameux [comprendre : très mauvais] ; avant de finir par reconnaître (au bout d'une demi-heure, en chuchotant)
qu'elle a réussi à se faire accepter par ses élèves au bout de 4 ou 5 mois. Ceux qui n'ont pas encore
compris pourquoi le niveau scolaire est en baisse (et la violence scolaire en hausse) arriveront peut-être à comprendre
que si d'emblée la moitié de l'année est perdue, le seul fait d'appartenir à une équipe pédagogique très solidaire et
investie ne suffira pas à transformer les quelques mois restants en une année scolaire pleine et entière...
Le problème de cette attitude — du professeur qui compte avant tout sur la solidarité entre
collègues — n'est bien sûr pas de l'avoir, mais d'en tirer argument pour assurer mordicus qu'une élévation
du niveau de sanction ou de punition à l'école serait à coup sûr inutile et malvenue, nouvelle illustration
de cette tendance lourde à vouloir opposer artificiellement des choses qui n'ont pas lieu de
l'être, à savoir : d'une part la solidarité entre professeurs, et d'autre part, la
question du niveau actuel de sévérité à l'école.
On l'a compris, l'idée centrale de cet argument anti-sanction est : si nous sommes solidaires et dynamiques, nous n'aurons
pas besoin de punir. A cela, commençons par répondre que la démarche du site Etat de droit
ne consiste pas à remplacer ce qui est positif par ce qui pourrait l'être encore plus, mais à
additionner tous les éléments qui
peuvent concourir à une amélioration de la situation dans nos écoles, collèges et lycées (comme on additionnerait les
bonnes volontés). Plus précisément, s'en tenir à la seule bonne entente entre professeurs (qui n'est pas acquise
d'avance) pour résoudre des problèmes de comportements de plus en plus graves dès l'école primaire, c'est
renoncer à toute autre logique que celle du sparadrap, du colmatage, de l'urgence, au
mieux de la demi-heure qui suit.
Bien sûr on prévoit des choses, des petits projets, des séquences finement préparées ; mais c'est pour annoncer aussitôt
à ses collègues que si l'on arrive à en réaliser le quart, c'est l'exploit ! A aucun moment il ne viendrait à l'esprit
de tous ceux qui ont été conditionnés — à l'idéologie anti-sanction — cette simple idée que des punitions
ou sanctions enfin dissuasives (quoique tout à fait contrôlées et proportionnées) pourraient être
plus efficaces dans la remise au travail de certains élèves. Même si vous leur dites : expérimentons !
testons ! et nous verrons ensuite si nous pouvons en tirer quelques conclusions ! Eh bien non... Ils vous répondent :
à quoi ça sert d'expérimenter puisque nous savons bien que cela ne marchera pas ?...
Les professeurs ou parents d'élèves les plus « laïques » et les pseudo-scientifiques des « sciences de
l'éducation » font preuve à cet égard d'un esprit bien plus religieux que scientifique. Qu'est-ce que l'esprit
scientifique ? Réponse d'Albert Einstein : Douter. Chercher. Découvrir. Prouver. Rajoutons :
se débarrasser de l'esprit de renoncement.
Oui, la solidarité, cela peut aider. Oui c'est important. Oui, le soutien qu'un collègue peut apporter à un autre collègue,
c'est toujours appréciable et bienvenu. Mais non, tout ne peut
pas être réglé par le seul esprit de groupe. Non, la seule solidarité entre professeurs n'a jamais résolu —
sur le long terme — de graves ou récurrents problèmes d'irrespect, d'indiscipline ou de violence à l'école. Et
surtout : NON,
cela ne permettra pas de faire obtenir de bons résultats scolaires à des élèves que le moindre effort rebute depuis
qu'ils sont tout petits.
2006-2009 © Etat de droit / Jean-Yves Willmann