Etat de droit
Nombreuses sont les décisions de Justice jamais exécutées en France.
Les « réformes de la Justice » succèdent les unes aux autres, mais n'ont de réforme de la Justice que le nom :
Dans le cas des inexécutions, la Justice est rendue en théorie mais pas en pratique, après souvent de longues
années d'attente. Pour l'essentiel, la Justice n'est d'ailleurs même pas rendue. Toute réforme qui ne vise pas à
enrayer ce phénomène est une réforme de la Justice vouée à réformer la théorie. A l'école on apprend à chaque
enfant que 1+1 = 2, mais dans la rue ou à l'audience
on découvre que 5 ou 15 (crimes successifs) = UN. La Justice pénale a réinventé l'arithmétique.
Grâce à la prescription, rester impuni pendant des années donne à l'auteur d'un délit ou d'un crime le droit de ne
jamais comparaître en Justice... La Justice pénale a réinventé la morale. (La prescription
ne concerne pas que la Justice pénale mais est surtout invoquée en Justice pénale du fait des
courts délais de prescription.) Notre Justice française
enfin annonce qu'elle a été « rendue » même si rien n'est rendu, et que l'on « gagne » pour perdre
parfois plus. La Justice a réinventé le vocabulaire. Tout ce qu'on apprend à l'école est donc faux...
A continuer dans cette voie d'une Justice surtout virtuelle, nous risquons le pire pour un Etat de droit : que l'on finisse par se faire justice soi-même. On sent d'ailleurs venir cette justice privée. On sait par exemple que des entreprises font maintenant appel à des « collaborateurs » musclés pour résoudre certains problèmes d'impayés, puisqu'aucune réforme de la Justice n'a encore permis à notre Justice publique d'être un peu efficace en la matière... Il ne s'agit pas ici de mettre en cause les professionnels de Justice mais les dispositions légales qu'ils appliquent et l'insuffisance de leur nombre. Il serait donc temps de redonner à notre Justice française ses lettres de noblesse : en retranchant des codes les dispositions obsolètes, en permettant aux nouvelles d'être effectivement appliquées, en formulant des propositions de réforme de la Justice pénale ou civile qui aillent dans le sens d'un renforcement de l'Etat de droit en France.
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Il ne s'agirait pas de fusionner les ministères, chaque service gardant son indépendance, mais d'assurer une cohérence gouvernementale dans la lutte contre la délinquance et la criminalité ainsi qu'en droit civil ou administratif. Désormais, chaque nouvelle réforme de la Justice pénale ou de la Justice civile comporterait (sauf exception) un volet « police », un volet « justice », un volet « budget ». Avec un cabinet resserré, secondé par un ministre délégué à la sécurité intérieure et par un ministre délégué à la justice, le ministre d'Etat serait chargé de l'évaluation préalable, de la complémentarité et du suivi de toute réforme impliquant les deux ministères (en relation avec le Parlement).
Une fois le jugement rendu, dès lors qu'il serait définitif ou assorti de l'exécution provisoire, le ministère public aurait le devoir et la charge de le faire exécuter rapidement sans qu'il ne soit demandé aucun avancement de frais supplémentaire à la partie gagnante ou à la partie civile. Désormais, en cas de refus d'obtempérer de l'autre partie, l'Etat mènerait intégralement la procédure en exécution, avançant les frais nécessaires, à charge pour lui de se les faire rembourser ensuite par la partie perdante ou coupable. Quant aux aspects financiers de la décision de justice, apparence d'insolvabilité ou non l'Etat garantirait qu'il fera tout ce qui est en son pouvoir pour les faire exécuter (obligation de moyens). Et en cas d'impossibilité d'exécution, des peines de remplacement pourraient être prononcées.
L'information serait largement diffusée en amont afin qu'un premier effet positif de cette réforme — la dissuasion préventive — puisse se faire sentir. Ne resteraient autorisées que les remises de peine pour bonne conduite et au titre de la libération conditionnelle dans la limite fixée par la proposition de réforme J6. Elles seraient toutefois conditionnées à de sérieux examens de la personnalité et à un dispositif de contrôle renforcé concernant les auteurs des crimes les plus graves. Sur ce dernier point, le doute devrait dorénavant profiter à la société et non plus au seul condamné en fin de peine. Quel que soit d'ailleurs le moment de sa libération, lesdites mesures de protection auraient vocation à s'appliquer dès lors qu'un doute subsisterait sur sa dangerosité potentielle.
Remarque |
Depuis que cette proposition a été rendue publique, la grâce collective semble ne plus avoir cours. Mais l'intention de réforme reste timide. |
Ce principe serait rendu légalement obligatoire, quels que soient le type ou la portée des décisions de justice rendues (y compris pour les courtes peines privatives de liberté) et la situation des personnes incriminées (y compris pour les primo-délinquants). Bien avant son entrée en vigueur, une estimation des nouveaux moyens nécessaires et du temps pour les mettre en œuvre devrait être effectuée, avec une enveloppe budgétaire prévue, dans le respect de la proposition de réforme J1. [L'énoncé complet apporte des précisions sur les délais.] Par voie de conséquence, le Juge d'Application des Peines verrait son champ d'initiative réduit. [Sur cet aspect, cf. proposition de réforme J6.]
Remarque |
Sur les délais d'exécution des décisions de justice à portée financière, consulter la Proposition J2. |
Dorénavant, un auteur d'infractions graves en série — reconnu définitivement coupable par la Justice française — serait sûr de subir une peine relative à chacun de ses crimes ou délits, quels que soient ses antécédents ou intentions futures, quel que soit le degré de concomitance des infractions et de leur jugement (qu'elles soient jugées séparément ou en même temps). Cette réforme de la Justice pénale prévoirait juste, en cas d'infractions très rapprochées commises dans un même élan, une possible atténuation de chaque peine (circonstance atténuante) ; mais PAS leur confusion : un premier crime ne dispenserait plus de peine additionnelle en cas de récidive, les peines s'appliquant cumulativement. Et dans le même but qu'en J3, l'information sur cette réforme serait largement diffusée.
Si l'on ne veut pas qu'un accusé aille en prison, il ne faut pas prononcer de peine de prison ferme ! Mais pour qu'audience ne rime plus avec simulacre, lorsque la Justice en prononcerait une elle devrait être exécutée (hors cas particulier). Ainsi, il ne serait plus permis au seul Juge d'Application des Peines « d'aménager » une courte peine de prison ferme en la remplaçant par des mesures alternatives. (Souvent peu exécutées...) Par ailleurs, toutes remises de peine confondues — parmi celles qui resteraient en vigueur selon la proposition de réforme J3 — leur cumul ne pourrait excéder 25 % de la durée ou somme des durées définitivement prononcées sauf exceptions. A charge pour juges et jurés, s'ils le veulent, de tenir compte de cette nouvelle réforme de la Justice au moment de délibérer.
Les délais de prescription de l'action publique seraient désormais les suivants :
— 5 années pour un délit mineur passible de deux mois à un an d'emprisonnement.
— 10 années pour un délit passible de deux ans à cinq ans d'emprisonnement.
— 15 années pour un délit grave passible de sept ans d'emprisonnement.
— 20 années pour un délit grave passible de dix ans d'emprisonnement.
— 25 années pour un crime passible de quinze ans de réclusion criminelle.
— 30 années pour un crime passible de vingt ans de réclusion criminelle.
— 40 années pour un crime passible de trente ans de réclusion criminelle.
— imprescriptibilité pour un crime passible de la réclusion à perpétuité.
En
outre, les délais
de prescription des peines seraient eux aussi allongés.
Cette réforme de la Justice conduirait à une définition de la récidive légale moins stricte. Seraient considérés commis en état de récidive : tout délit intervenant dans un délai de 10 ans après expiration ou prescription de la peine issue d'une précédente condamnation (définitive) pour délit quel que fût ce délit ; tout délit commis dans un délai de 20 ans après expiration ou prescription de la peine issue d'une condamnation pour crime ou tout crime commis dans le même délai après expiration ou prescription de la peine issue d'une condamnation pour délit ; tout crime après une condamnation pour crime sans condition de délai. En outre, la loi Dati du 10 août 2007 serait un peu remaniée (fermeté accrue).
Par rapport à la législation actuelle, le refus de se soumettre à une injonction de soins ne se traduirait plus seulement par l'éventuelle révocation d'un sursis ou par une éventuelle légère diminution des réductions de peine : il constituerait en soi une nouvelle infraction. Le détenu concerné ne serait pas physiquement contraint de suivre le traitement ordonné mais son refus persistant le conduirait à comparaître en correctionnelle indépendamment de ses infractions passées. Ce nouveau délit serait passible d'un an de prison ferme — deux ans en cas de récidive ou duperie — la nouvelle peine s'exécutant automatiquement dans la prolongation de la peine en cours.
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J-Y Willmann © Etat de droit depuis 2006