Etat de droit
Le deuxième extrait suivant est tiré de l'interview de J.Y. Willmann par C. Lacam en ce mois d'août 2008 ; d'autres extraits suivront prochainement ; l'intégralité de cette interview sera consultable par la suite.
Ecole : le pouvoir principal a été donné aux élèves les plus durs. (00:03:03) | Tel est le triste et terrible constat qui résulte de la perte de pouvoir — et donc d'autorité — de nos professeurs. Les porteurs de l'idéologie anti-sanction en France n'en ont visiblement pas conscience, ou s'en contrefichent, ou s'en félicitent...
Le premier perdant, dans cette lamentable histoire de démagogie, c'est le professeur qui voit son autorité réduite comme peau de chagrin et ses conditions de travail de plus en plus délabrées.
Le deuxième et plus grand perdant de l'histoire, c'est bien sûr l'élève — et disons-le au pluriel : tous les élèves ! D'abord ceux qui font des efforts au quotidien, mais qui subissent la loi du plus violent. Puis ceux-là même qui se jettent abusivement sur ce pouvoir démesuré que des adultes irresponsables leur ont octroyé, mais qui risquent de le payer cher par la suite, puisqu'en leur laissant prendre les pires habitudes on les pousse vers la délinquance.
Enfin, les parents n'auront rien gagné à cette complaisance inouïe que transporte notre « Education nationale » de territoires excentrés en Territoires perdus (de la République) depuis plus de 20 ans, car à certaines carences éducatives familiales s'ajoute désormais une prodigieuse carence de l'autorité institutionnelle. S'il ne fallait prendre qu'un seul exemple, ce pourrait être celui-ci : depuis le 13 juillet 2000, un élève très indiscipliné ou très violent qui se sera fait renvoyer de son établissement peut à lui seul donner tort à ses professeurs, à son proviseur (ou principal) et jusqu'au recteur de l'académie ! Inutile de dire qu'après ça il aura d'autant plus de facilité à donner tort à ses propres parents ! Mais n'oublions pas les autres parents, c'est-à-dire la très grande majorité des parents d'élèves : qu'ont-ils à gagner à ce que de plus en plus d'élèves se croient — à juste titre hélas — tout permis ? Qu'ont-ils à gagner à voir leurs enfants évoluer dans des contextes de plus en plus incontrôlables ? Nous sommes en 2008 et ce type de texte officiel de l'Education nationale est toujours en vigueur...
Quant à la société — au cas où on l'aurait oubliée — c'est-à-dire nous tous, nous sommes bien sûr collectivement perdants avec cette démagogie insensée qui consiste à donner le pouvoir principal aux enfants les plus déviants. Nous perdons de l'argent, des compétences, du temps. Nous perdons la confiance, la croissance, du dynamisme, des emplois futurs... Nous perdons tout ! Tel est le résultat ô combien contreproductif de cette idée saugrenue d'avoir voulu ériger l'Enfant en Roi, funeste idée qui n'aura réussi qu'à le rendre malheureux tout en fragilisant durablement la société française dans son ensemble.
En fait, ce que demandent les tenants d'une autorité dénuée de tout pouvoir de contrainte est... extravagant : ils demandent l'impossible ! ils espèrent un miracle ! Et à force de réclamer leur société idéale — qui n'existe nulle part ailleurs que dans leur tête — ils rendent juste beaucoup plus dure la société réelle dès l'école maternelle.
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J-Y Willmann © Etat de droit depuis 2006