Etat de droit
[12 juillet 2006]
Proposition E5 Proposition complète
Pourquoi
Pourquoi
?
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Actuellement,
en primaire, les professeurs n'ont pratiquement aucun pouvoir
de sanction à l'encontre des élèves, et de manière générale, très peu de
moyens d'action ou de décision. Les conséquences peuvent en être catastrophiques à tous points de vue :
tant sur le niveau des élèves que sur l'ambiance dans les classes et la perte des repères chez ces petits êtres en
formation, ou en malformation devrait-on dire parfois... Ajoutons que cette absence de droit institutionnel accordé aux
personnels scolaires a tendance à conduire ces derniers à s'en donner eux-mêmes, avec tous les risques d'arbitraire (ou
pour la sécurité) que cela comporte : qu'il s'agisse d'un professeur d'ordinaire très mesuré qui se fera traîner devant
les tribunaux pour une petite claquette lâchée sur le pantalon d'un grand élève de CM2, qu'il s'agisse au contraire d'un
professeur peu scrupuleux qui aura dans sa ligne de mire un élève en particulier et lui mènera la vie dure de manière
injuste et disproportionnée, ou qu'il s'agisse de situations beaucoup plus banales comme celle qui consiste à mettre
provisoirement dans le couloir (faute de structure pour l'accueillir) un élève de primaire qui va s'en éloigner à
l'insu de sa maîtresse pour faire Dieu sait quelle bêtise...
On le voit suffisamment : l'absence de règle — à laquelle l'absence de sanction aboutit inévitablement —
produit quantité d'effets pervers. En entérinant dans les faits le fameux «Il est interdit
d'interdire !», nous autorisons les élèves à s'insulter copieusement, à s'agresser mutuellement, à
piétiner le droit d'étudier sereinement... [On ne va pas répéter davantage, ici, ce qui est largement développé
dans d'autres pages.] Mais nous faisons aussi prendre des risques inutiles à tout le monde :
aux élèves comme aux personnels scolaires.
Sauf à considérer la plupart des professeurs
comme irresponsables et dangereux, il ne devrait donc pas apparaître excessif ou malvenu de leur accorder enfin quelques petits moyens d'action individuels de nature à leur permettre de faire
respecter des règles qui, en l'état actuel, sont aussi théoriques que sont réelles les violences et incivilités
scolaires de tous ordres, en forte augmentation depuis les années 1990.
Quant aux professeurs du secondaire, s'ils disposent en théorie de quelques moyens pour faire sanctionner leurs
élèves, ce pouvoir est relatif puisqu'il repose beaucoup sur le bon vouloir des autres
acteurs ou « usagers » de l'école : chef d'établissement, conseiller principal d'éducation, voire
parents d'élèves et élèves eux-mêmes dans les conseils
de discipline... C'est-à-dire que s'ils ne sont pas suivis et qu'ils ont dans le même temps des classes très difficiles,
leur marge de manœuvre est fortement réduite. Et quand bien même ils arriveraient à s'en sortir, ce sera souvent
au prix de plusieurs mois mouvementés pour arriver (partiellement) à s'imposer :
dans un nombre croissant d'écoles
les élèves ne travaillent pas pendant toute l'année scolaire mais pendant une partie seulement (au mieux),
avec les retards qui s'ensuivent et qui ne seront jamais comblés, avec en fait toujours les mêmes désastreuses
conséquences humaines et économiques.
En somme, si l'on voulait prendre une image «footballistique» d'actualité,
on pourrait dire qu'en primaire il n'existe ni carton rouge ni même
de cartons jaunes tandis que dans le secondaire il n'existe pas plus de carton rouge
et seulement de rares petits cartons jaunes, et encore : à condition d'avoir l'énergie suffisante pour
passer outre toutes les résistances, une fois les dégâts bien étendus. Or, si l'on enlevait les cartons rouges
des compétitions de football, si aucun joueur n'était expulsable quoi qu'il fasse, que se passerait-il ? Il n'est
pas besoin d'être devin pour répondre : les matchs se termineraient en bain de sang... C'est donc que les cartons
sont utiles, nécessaires, salutaires. Alors pourquoi les a-t-on retirés des cours de récréation ??
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J-Y Willmann © Etat de droit depuis 2006